lundi 11 juin 2012

Plein les ovaires

Être invitée à déjeuner
dans un petit resto tout mignon
un confidentiel
lové dans une rue malfamée

Une discussion de travail
des dossiers ouverts
envol des feuilles neutralisé par nos verres.

Nous prenons des notes,
échangeons des informations
quand soudain je réalise qu'une assiette
fumante
a pris place devant moi.

Je la regarde
avec délectation
Les arômes s'en échappent
titillent mes narines, les enivrent
me donnent un sourire roucoulant

Je lève la tête
Notre hôtesse nous fait face,
attentive
elle attend nos réactions
et moi
je la regarde avec admiration

Elle toute petite
toute menue
jolie
gracieuse
notre hôtesse
notre cuisinière
et pourtant je vois bien
l'énergie bouillonnante
qui coule dans ses veines
qu'elle fait partie de la race
de celles dont on dit qu'elles ont des couilles

expression qui me laisse pour le moins pantoise

parce que non,
enfonçons de portes ouvertes,
mais il est des choses qui doivent être dénoncées
les femmes ont certes des glandes,
des ovaires
qu'elles gardent pour elles
bien au chaud
sans en faire étalage
sans les poser sur la table

et des lacrymales qui se déversent
en flots de lassitude
de découragement

des sudoripares
qui saturent leurs fronts
qu'elles épongent
d'un rapide revers de main

Elles avancent
lasses
harassées
se riant d'elles-même
car rien n'est grave
qu'elles ne peuvent s'arrêter
qu'il leur faut avancer
pour ne pas tomber
et puis rire jusques aux larmes
pour mieux creuser sur leur visage
des crevasses et des rides de douleur

Seules
abandonnées
par des hommes
qui veulent vivre leur vie
la tête calée
contre des fesses jeunes et rebondies

Ils s'amusent
elles assument
leurs contradictions
leurs contradictions

Elles baissent les bras
parfois
Mais n'abdiquent jamais

Elles s'effondrent
et gardent la tête haute

Car elles savent 
ou croient
que plus personne ne veut d'elles
trop vieilles
trop tard
plus de regard qui s'égare sur leurs corps
elles sont devenues transparentes
elles se vivent insignifiantes

Alors elles pourront vous avouer
être lâches
vivre la peur au ventre

vous diront ne pas avoir le choix
elles portent dans leur ADN
la responsabilité de la vie
entretenir la flamme,
vestales à la temporelle immortalité








Moi que de remplir une feuille d'impôt
me transforme en écolière
face à l'épreuve de la dictée

moi qui me prépare mentalement 2 mois à l'avance à traverser le monde
seule
à l'abri d'une carlingue

moi qui traverse nuitamment ma ville
fesses concaves à force d'être serrées
main profondément  enfoncée dans la poche
et crispée sur une bombe lacrymo

moi qui appréhende de me retrouver en tête-à-tête avec ma boîte aux lettres
lui est fixé un rendez-vous régulier et hebdomadaire

Moi qui au quotidien galère et rame

Moi qui ai le sentiment de jouer à l'adulte

Moi qui quelque fois a des difficultés à me faire respecter et ne vous parlerai même pas de me faire obéir

Moi qui parfois en arrive à pratiquer l'auto-flagellation, me traite de nouille sans sel et trop cuite

Moi, qui me reconnais fragile
j'ai appris à tomber
et à me relever

encore
et encore





2 commentaires:

  1. Tu écris des textes qui remuent tout en nous pfiou....
    Dans la 2ème partie, je me rends compte que je me reconnais dans ce que tu dis... juste la dernière phrase est différente... j'ai appris à tomber, mais pas à me relever... Plus...
    Passe une bonne soirée et continue à nous écrire d'aussi belles choses de la vie. Bisous

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