dans ma mémoire
imprimées
dans mes rétines
gravées
dans les cellules de mon corps
ces voluptueuses
ces somptueuses
ces gracieuses
Elles étaient sur la route de mon marché
de dernier jour
de presque désespoir
un bien grand mot
pour un gros chagrin
J'étais avide
de couleurs
d'odeurs
de photos
jusqu'à plus voir
n'en plus pouvoir
jusqu'à la nausée
ou de me perdre
de m'évaporer
et rester là
pour toujours
à jamais
plus vouloir
Et c'est elles qui m'ont appelé
de quelques mots
incompréhensibles de moi
mais avec des gestes universels
qui me disaient
"viens, prends moi en photo"
et de prendre la pose
et de m'offrir leurs sourires
et leurs rires
sans tricher
sans se cacher
sans dissimuler
les disgrâces
les usures du temps
les ravages de la vie
Elles ne demandaient rien
ne voulaient rien
d'autres que je témoigne de leur existence
de notre rencontre
Je me suis appliquée
que vous puissiez voir leur beauté
celle que j'admire dans tant de vieilles femmes
ces méditerranéennes que l'existence n'a pas épargnée
les survivantes
que l'on ne regarde plus
ne désire plus
qui n'ont pas oublié ce qu'est d'aimer
Je voulais saisir leur offrande
leur force
leur vérité
leur rendre ce dérisoire hommage
Et puis je leur montrais le résultat
et invariablement
elles éclataient de rire
de joie
Et la fleuriste m'a demander de me tourner
et dans mon chignon
a fixé une guirlande de jasmin
dans mes cheveux
L'une de celles que j'admirais tant
sur les indiennes
qui me faisaient tant envie
que je n'osais
dont je ne me sentais pas digne
Alors
Je ne vous parlerai pas des larmes qu'il m'a fallu ravaler
je ne vous raconterai pas que
jamais
je n'avais eu plus beau cadeau
je ne vous dirai
alors qu'elle s'était détachée de ma chevelure
combien de fois j'y ai enfoui mon nez
Je sais
que vous savez
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